« Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? »
Il y a une histoire de Jean de la fontaine qui parle des besaciers.
» On se voit d’un autre œil qu’on ne voit son prochain » écrivait-il.
La poche de derrière cache bien des défauts, tandis que la poche de devant met en ostentation les défauts d’autrui.
Dans l’Évangile, les scribes et les pharisiens qui amènent une femme accusée d’adultère à Jésus semblent bien ressembler à ces besaciers.
D’entrée de jeu, on remarque une absence.
C’est l’absence de l’homme.
Et pourtant, la femme accusée d’adultère n’est pas seule dans cette histoire.
« Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? »
Il ne reste que la caution de Jésus pour achever le forfait.
Descendons dans l’esprit de cet événement.
Il y a un piège que l’on vient de tendre au Seigneur.
Une telle attitude est précisément ce que condamne le Seigneur.
Il haït le péché, car le péché brise notre relation avec Dieu.
Mais il aime le pécheur, car il sait que le pécheur est capable de repentance et de conversion.
Dieu ne veut donc pas la mort du pécheur, mais que le pécheur se convertisse et vive.
Parmi ces pharisiens et ces scribes, qui serait sans péché ?
Personne.
Et pourtant, ils n’ont pas hésité à manquer de charité.
Même à Dieu, ils ont l’audace de tendre un piège.
« Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? »
Que dis-tu ?
» Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre. »
Que dis-tu ?
Par sa Loi, celle-là même qui éduque et humanise l’homme, Dieu a déjà parlé.
Il a écrit cette Loi pour tous. Pas seulement à l’intention de cette femme accusée.
C’est pour tous que Dieu a écrit sa Loi.
Or, voici qu’il prend au dépourvu ses adversaires.
« Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Dieu n’a pas dit » Ne jetez pas la pierre à cette femme « .
Car s’il dit cela, on le traitera de celui qui remet en cause l’autorité de Moïse.
S’il ordonne de jeter la pierre à cette femme, on le prendra aux mots. Car on dira que il prêche l’amour et que il dit le contraire de ce qu’il prêche.
« Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? »
Tout le monde est suspendu à ses lèvres.
On guette ce qu’il va dire.
Ces gens se réjouissent, peut-être, à l’intérieur dmêmes l’idée de l’avoir enfin dans leurs filets.
Que peut-il donc répondre pour s’en sortir, imaginent d’autres.
Le coeur de l’homme est malade et compliqué.
Dans certaines situations, le fourbe peut se croire plus intelligent que Dieu.
Mais c’est sans compter sur l’imprévisibilité de la Sagesse de Dieu.
« Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Puis, c’est la surprise.
» Il se baissa de nouveau et il écrivait sur la terre. Eux, après avoir entendu cela, s’en allaient un par un, en commençant par les plus âgés. »
Dieu écrit au début et il écrit à la fin.
Il est l’Auteur de la Loi que ces adversaires lui brandissent pour le confondre.
Il est à l’origine et au terme de la Loi divine écrite et inscrite dans les cœurs.
Il est Charité et Miséricorde.
La justice de Dieu, ce n’est pas souhaiter la mort de l’autre.
La justice de Dieu, c’est d’aider le pécheur à grandir et à renoncer à son état de mort.
C’est le sens même du sacrement de la guérison.
Seul à seul avec le Seigneur, cœur à coeur avec lui, il nous pardonne par la médiation de l’Église, son Epouse.
» Jésus resta seul avec la femme toujours là au milieu. Il se redressa et lui demanda : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle répondit : « Personne, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
Dieu n’entre pas dans une logique de jugement.
Mais il entre dans une logique de conversion et d’amour.
» Va, et désormais ne pèche plus. »
Car le péché détruit notre vie de communion avec Dieu.
Qui parmi nous serait saint devant sa face ?
La conscience que nous sommes tous des pécheurs nous oblige à l’humilité et à un sentiment de charité qui aide le frère en difficulté.
Dans cet état d’humilité, on s’ouvre à Dieu en tant que pénitent, tel l’enfant prodigue et on demande son pardon.
On laisse l’amour de Dieu envahir notre coeur et on s’exerce à aimer, en retour, en nous engageant sur le chemin de la sainteté.
Notre état d’humilité nous ouvre à la Parole de Dieu et à la correction fraternelle.
Notre état d’humilité nous ouvre au don que Dieu nous fait de lui-même à chaque Eucharistie.
Est-ce que nous faisons confiance à l’amour de Dieu ?
Est-ce que nous lui confions nos culpabilités et nous ouvrons à son pardon ?
Seigneur, guéris nos cœurs malades.
Père Serge Martin Ainadou