Dans une nouvelle lettre encyclique sur le Sacré-Cœur de Jésus, publiée le 24 octobre 2024, le Pape François rappelle la puissance de l’amitié du Christ avec les hommes. Dans cette lettre, il revient sur le symbolisme du » cœur » et la possibilité pour la » société mondiale » de changer à partir du » cœur ».
Le tréfonds des êtres humains
Le Pape rappelle que le cœur, dans le monde antique, indique le centre corporel, mais aussi spirituel de l’homme. » Dans l’ Iliade, rappelle-t-il, la pensée et le sentiment relèvent du cœur et sont très proches l’un de l’autre. » Le Pape demande donc de revenir au cœur.
Il soutient l’urgence de ce retour par le fait que le monde, de tendance, tente de nous en éloigner. « L’homme contemporain est souvent perturbé, divisé, presque privé d’un principe intérieur qui crée l’unité et l’harmonie de son être et de son agir » écrit-il. Le Successeur de Pierre n’hésite pas à reconnaître que, pendant longtemps, les concepts de volonté et de raison ont été privilégiés sur la notion du cœur. » L’idée d’un centre personnel, où la seule chose qui puisse tout unifier est en fin de compte l’amour, n’était pas non plus largement développée » note le Saint-Père à travers l’encyclique Delexit nos. Le cœur serait donc » dévalorisé ». Et » si le cœur est dévalorisé, alors parler avec le cœur, agir avec le cœur, mûrir et prendre soin du cœur est également dévalorisé » soutient-il.
Notre cœur coexiste avec les autres cœurs
Le Pape prend en compte les dimensions à la fois philosophique et théologique du » cœur ». Il remarque que c’est par le cœur que naît la possibilité de la rencontre. » Seul le cœur peut accueillir et donner l’asile » rappelle le Pape dans sa lettre encyclique. » Il faut que la volonté désire le bien le plus grand que le cœur connaît, et que l’imagination et les sentiments se laissent modérer par le battement du cœur » exhorte le Souverain Pontife. On identifie ainsi la personne à son « cœur ». Pour l’évêque de Rome, le mot » cœur » ne peut être épuisé par la biologie, encore moins par la psychologie. Il établit aussi un rapport inouï entre le » cœur » et la » connaissance ». » Cela nous conduit inévitablement à l’amour dont le cœur est capable, car « le fond de la réalité c’est l’amour ». ( & 16). Il a même semblé important pour le Pape d’évoquer, dans son encyclique, la figure du philosophe allemand Heidegger pour qui » la philosophie ne commence pas par un concept pur, une certitude, mais par une émotion » ( & 16). L’émotion fait donc questionner.
Le cœur unit deux choses séparées
Le Pape revient sur le sens du mot » symbole « . Du grec symballein, le terme « symbole » signifie » unir deux choses dans son esprit » ( & 19). » Tout s’unifie dans le cœur qui peut être le siège de l’amour avec la totalité de ses composantes spirituelles, émotionnelles et même physiques » rappelle le Souverain Pontife. La réalisation de l’identité de la personne devient donc tributaire de son expérience de l’amour dans son cœur. La personne est faite » dans ses fibres les plus profondes pour aimer et être aimée » rappelle l’encyclique. A partir d’ici, le Pape s’inquiète face aux guerres et en arrive à la conclusion que le » monde perd son cœur ». Le Pape invite chacun à s’interroger sur la fin ultime de l’existence dont le sens ne s’éclaire qu’à l’aune de l’amour humain et divin et à se demander s’il a un cœur. Pour le Saint-Père, ce questionnement serait le point d’intérêt pour » son cœur » puis pour » l’inconnu du cœur ». A cet effet, il convoque la figure de saint Ignace et la théologie des Exercices Spirituels de saint Ignace, fondateur de la Compagnie des Jésuites. » Quelque chose d’inattendu commence à parler dans le cœur de la personne, quelque chose qui naît de l’inconnaissable, enlève la surface de ce qui est connu et s’y oppose » précise l’encyclique. Le Pape met un accent particulier sur l’expérience des limites manifestes de la pensée humaine marquant l’ouverture à une amitié particulière. Celle-ci est offerte par un autre, un « je » qui devient l’ami d’un » tu ». » Accepter son amitié est une affaire de cœur et nous constitue en tant que personnes au sens plein du terme » rappelle le Pape. ( &25).
L’expérience du cœur à cœur
Savoir que le Christ est mort pour nous ne reste pas une connaissance abstraite mais devient nécessairement sentiment, amour ». Le Pape rappelle que saint Bonaventure, à cet effet, ne parle pas de » lumière », mais de » feu ». Le lieu de la rencontre devient un dialogue entre le Sacré-Cœur de Jésus et notre cœur. L’Eucharistie est le lieu de cette rencontre. Le Pape rappelle également que le monde peut changer à partir du cœur. » Allons vers le Cœur du Christ, le centre de son être qui est une fournaise ardente d’amour divin et humain et qui est la plus grande plénitude que l’homme puisse atteindre. C’est là, dans ce Cœur, que nous nous reconnaissons finalement nous-mêmes et que nous apprenons à aimer » invite le Saint-Père. C’est pourquoi, il indique les gestes et paroles qui reflètent l’amour humain et divin du Cœur sacré de Jésus et dont nous pouvons demander les grâces. Le Saint-Père, dans cette encyclique, rappelle que nous ne pouvons pas devenir pleinement nous-mêmes si nous n’aimons pas. » Le centre le plus intime de notre personne, créé pour l’amour, ne réalise le projet de Dieu que lorsqu’il aime. C’est pourquoi le symbole du cœur symbolise en même temps l’amour » precise l’encyclique. Les événements de Paray-le-Monial, à la fin du XVII ème siècle sont relus par le Saint-Père. » Sainte Marguerite-Marie Alacoque a fait le récit d’importantes apparitions entre la fin de décembre 1673 et juin 1675. De la première grande apparition, ressort essentiellement une déclaration d’amour. Jésus dit : « Mon divin Cœur est si passionné d’amour pour les hommes, et pour toi en particulier, que, ne pouvant plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité, il faut qu’il les répande par ton moyen et qu’il se manifeste à eux pour les enrichir de ses précieux trésors que je te découvre » rappelle le Pape dans son encyclique consacrée au Sacré-Cœur de Jésus. Le Pape propose également d’autres figures de dévotion au Sacré-Cœur de Jésus comme Saint Charles de Foucauld et Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Au chapitre V de sa lettre encyclique, le Pape rappelle qu’il s’agit d’une relation d’amour pour amour. » C’est alors que surgit spontanément la célèbre supplique : “Jésus, rends notre cœur semblable au tien”. ( & 168). En conclusion, le Pape établit un rapport lumineux entre la nouvelle encyclique et ses encycliques sociales Laudato si et Fratelli Tutti. » En nous abreuvant de cet amour, nous devenons capables de tisser des liens fraternels, de reconnaître la dignité de tout être humain et de prendre soin ensemble de notre maison commune. » souligne-t-il. ( & 217).
La rédaction de Les Maux de ma foi