La forme des « prédications », si c’en est une, apparaît simpliste. Elle accroche cependant beaucoup d’adeptes, laminés par des problèmes existentiels et séduits par la pensée positive. « Les exemples les plus courants relèvent de deux pôles », précisent des spécialistes. Un premier pôle, c’est cette tentation à élaborer un discours fondamentaliste qui n’admet comme seule expression de vérité que le sens littéral des textes sacrés ; et le second, c’est l’individualisme ou le subjectivisme acosmique.
Le subjectivisme acosmique
La Congrégation pour la Doctrine de la foi mettait en garde contre cette nouvelle tentation. Celle-ci consiste à juxtaposer des demi-vérités les unes à côté des autres et à affirmer que « Dieu n’a pas créé de religion » ou bien que « comme Dieu serait en tout lieu, il est inutile de parler de catholique, à part, ou de personnes d’une autre confession religieuse à part… ». Suite à plusieurs recadrages des discours de leaders de communautés nouvelles, des observateurs consultés estiment qu’il y a de moins en moins de tels discours. A plusieurs occasions, des spécialistes rappellent qu’il ne faudrait pas confondre les bases du dialogue oecuménique objectivement connues avec des un certain nombre d’amalgame qui plonge des personnes non-averties dans des erreurs. C’est surtout le problème du contenu des discours qui se pose et d’une reconnaissance affirmée de son identité « . D’après le Père Antonio Spadaro, directeur de publication de la revue La Civilita Cattolica, il y a un danger à parler d’un « évangile différent ».
« L’idéologie de l’évangile de la prospérité surfe donc sur une approche erronée de l’œcuménisme et nie, en fin de compte, ce qui constitue des différences fondamentales de chacun, nécessaire pour un vrai dialogue dans la vérité » rappellent les spécialistes. Ainsi, selon ces derniers, à la suite d’une interprétation erronée de la réalité de l’amour chrétien, les promoteurs de cette idéologie provoquent une confusion, relativisent les vérités de la foi chrétienne. On sait désormais que « pour eux, Jésus a déjà souffert une fois pour toutes et que nous, nous n’avons plus besoin de souffrir ». A cette erreur s’opposant à l’Évangile de façon frontale, s’ajoute l’idéologie d’un « individualisme centré sur un sujet autonome » dont la réalisation dépend de ses capacités personnelles et prométhéennes à posséder des « secrets sur la prospérité ». « Aujourd’hui, le mécanisme lexical de certaines prédications de certains leaders de communautés nouvelles fonctionnent sur cette base, de type néo-pentécôtiste. Révélation suppose quelque chose qui n’ait connu que d’une personne seule quantifiée ek terme de « mérite » d’onction alors que la Révélation est publique ou privée selon qu’elle repose sur les Saintes Écritures ou qu’elle provient d’une apparition ou d’une vision dont le contenu ne vient pas remettre en cause les données de la foi ».
La vie chrétienne n’est pas réduite à un enthousiasme d’un moment
Dans cette optique, prévient le Père Henry- Jérôme Gagey, spécialiste, « la vie chrétienne est réduite à une imitation « enthousiaste » d’un moment du Christ, considérée comme un modèle qui inspire des actions généreuses, mais pas identifié dans sa radicale nouveauté, comme celui qui transforme la condition humaine. « On oublie alors que le salut nous est offert par lui, à travers l’Église, la vie communautaire et les sacrements » ajoute-t-il. L’insistance sur « le miracle de la prospérité » ou bien « le miracle de la guérison physique » développe ainsi une image d’un Dieu de type « guérisseur », mais envers qui on ne s’engage pas finalement, sinon que pour satisfaire une quête de sécurité psychologique.
Pour certains observateurs, il y a une tentation à l’isolement et à la suffisance autoréférentielle. Elle devient forte alors que le salut a une dimension intrinsèquement communautaire.
Le problème du fondamentalisme
C’est ici que les plus avisés pointent du doigt « le subjectivisme acosmique ». Pour les spécialistes, il se traduit par une interprétation erronée de la Parole de Dieu. A l’extrême, « l’erreur devient la vérité et la vérité, l’erreur, pourvu que l’on prétende que c’est sous l’onction et la puissance de Dieu ». Pour le Père Spadaro, spécialiste des questions de l »évangélisme de prospérité, l’absence totale d’ empathie et de solidarité des adeptes de cette idéologie pour ceux qui souffrent et sont malades n’est que la conséquence logique d’une absence d’un sens de communauté, chacun pensant que Dieu deviendrait une « propriété privée » en dehors de la vie d’unité du Corps mystique du Christ.
Ainsi, face à une épreuve de maladie, par exemple, notent des spécialistes, un promoteur de cette idéologie ne la verra que, à quelques exceptions près, comme une preuve soit d’un « châtiment de Dieu », soit comme étant une conséquence d’un manque de foi assimilé à une pensée positive. « Le fondamentalisme devient désastreux ici puisque les textes bibliques sont travestis dans la perspective d’une erreur d’interpretation. Certains discours continuent de soutenir que des pères ont mabgé des raisons et que les enfants en ont eu les fents agacées alors que dans le livre du prophète Jérémie Dieu corrige cette vision et rend chacun responsable de ses actes devant lui. Dans les mots de Jérémie: « Chacun mourra pour sa propre faute. Tout homme qui aura mangé des raisins verts, ses propres dents seront agacées. » (Jr 31, 30) ». soulignent des spécialistes.
« La foi devient un mérite pour s’élever dans l’échelle sociale et non pas un don et un lieu de transformation intérieure, d’engagement ecclésial et social », concluent-ils.
Lionel Azelokonon